Au départ, il faut déjà comprendre comment ouvrir l’enveloppe de vote. Puis éplucher les brochures en papier recyclé difficiles à comprendre pour qui n’est pas habitué au langage fédéral. Enfin, il faut pouvoir répondre à des questions touchant aux finances, à l’environnement ou à la santé, sans pour autant être expert de l’un de ces domaines.

La politique suisse, qu’elle soit communale, cantonale ou fédérale, n’est pas toujours facile à comprendre. Cela peut décourager au moment de glisser son bulletin dans l’urne et cela se ressent dans les taux de participation qui dépassent rarement les 50%. Chez les jeunes entre 18 et 25 ans, ce taux s’avère plus faible et fluctuant, selon les thématiques. Les objets touchant au climat ou au service militaire ont ainsi un meilleur taux de participation qu’une question financière.

Un projet enfin majeur

La problématique n’est pas nouvelle, le Parlement des jeunes de Köniz s’est penché sur le sujet et a créé easyvote en 2003 déjà. Très vite, d’autres parlements de jeunes du canton de Berne se sont intéressés au projet, qui a pris de l’ampleur. En 2012, la Fédération Suisse des Parlements des Jeunes (FSPJ) reprend le flambeau. L’expansion se poursuit à un rythme effréné, pour atteindre aujourd’hui 14 cantons et 536 communes, en quatre langues, ce qui représente plus de 142’000 jeunes atteints, et cela grâce à l’aide de 170 bénévoles.

Des outils visuels

easyvote vulgarise les objets mis en votations, en utilisant les outils qui parlent aux jeunes. Des vidéos explicatives courtes et rythmées, des infographies, une application mobile. « Grâce à la collaboration avec les cantons, qui nous soutiennent financièrement, nous pouvons produire des brochures cantonales et motiver les communes à adhérer à notre projet. Elles jouent un rôle fondamental : c’est en effet elles qui décident de soutenir la formation de l’opinion de leurs jeunes en adhérant à easyvote », explique Alice Zollinger, collaboratrice relation clients (ndlr: cantons et communes). Concrètement, pour la votation du 13 juin 2021, l’équipe a rédigé des textes sur 21 objets, aux niveaux fédéral et cantonal.

« Nous essayons de diminuer les obstacles à la votation. Pour cela, nous identifions les besoins des jeunes, en les rencontrant là où ils sont, de leur table à manger avec nos brochures, jusqu’aux réseaux sociaux, dévoile Alice Zollinger. Chaque année, avec le gfs.bern, nous étudions l’intérêt et la participation politique des jeunes (sous quelque forme qu’elle soit). »

Une jeune équipe très motivée

Pour être en accord avec son public-cible, l’équipe d’easyvote se compose de jeunes entre 25 et 32 ans, qui terminent en parallèle leurs études, à l’image de notre interlocutrice qui achève un master en management public, ou qui travaillent à temps partiel.  L’équipe est plurilingue et provient de tout le pays, « nous nous parlons indifféremment en allemand, en français ou en italien ». Du fédéralisme appliqué, pour ainsi dire. Le projet bénéficie d’une excellente réputation et les anciens collaborateurs travaillent aujourd’hui dans l’administration publique, dans de grandes entreprises comme la SSR, ou dans des ONG. « La FSPJ est un tremplin pour la carrière. » Passionnés par la politique suisse, aucun des douze collaborateurs actuels ne milite pour autant dans un parti, et easyvote ne mène pas non plus forcément à une carrière politique.

En revanche, ils maîtrisent les contours du fédéralisme et savent en jouer. « La vitalité du fédéralisme suisse se reflète dans la diversité des modes de participation des citoyens, il est donc crucial pour l’avenir du fédéralisme que les jeunes participent au processus politique à tous les niveaux et fassent entendre leur voix. La FSPJ et easyvote font un travail central pour la politique suisse et pour le fédéralisme », explique Alice Zollinger.

Le fédéralisme par et pour les jeunes

Le fédéralisme n’est pas que l’affaire des politiciens à Berne et dans les cantons, mais concerne aussi et surtout les jeunes adultes. C’est ce qui a motivé la FSPJ à envoyer une candidature au Prix du fédéralisme, pour ce projet. En outre, le plurilinguisme est ancré dans l’ADN d’easyvote.

Le 28 mai 2021, la remise du prix a eu lieu par écrans interposés lors de la Conférence nationale sur le fédéralisme, organisée par la ville de Bâle. Le trophée a voyagé d’un écran à l’autre. « Nous nous réjouissons énormément d’avoir reçu ce prix. Ceci représente une reconnaissance solide de notre travail et nous motive à poursuivre notre objectif : amener toujours plus de jeunes aux urnes et améliorer l’éducation à la citoyenneté parmi la génération future. »

Le projet remporte la somme de 10’000 francs. « Ce montant va nous permettre de consolider nos activités, comme l’outil pédagogique easyvote-school, qui est gratuit et pour lequel nous sommes en permanence à la recherche de fonds. »

Prix du fédéralisme revitalisé

L’édition 2021 a été à plusieurs titres une première. Le prix a été revitalisé en invitant des personnalités à rejoindre le jury. Ainsi, la journaliste Gülsha Adilji, Tania Ogay, professeure au Département de l’éducation et de la formation de l’Université de Fribourg, ainsi que le président du Locarno Film Festival Marco Solari ont œuvré aux côté des conseillers d’État Pascal Broulis (VD) et Christian Rathgeb (GR) – présidents de la Fondation ch et de la CdC -, et de la chancelière d’État du canton de Fribourg Danielle Gagnaux-Morel.

Le Prix est doté de 10’000 francs et répond à un appel à candidatures. L’édition 2021 a connu un large écho puisque près de 50 dossiers ont été envoyés. Les critères tels que la communication, l’innovation, la participation, les traditions ou la cohésion nationale ont été évalués par le jury. Celui-ci a choisi easyvote pour son action auprès des jeunes et pour le plurilinguisme.